domingo, 18 de julio de 2010

La Machine à inventer

Felix avait toujours cru en son destin. Un destin fait d'inventions, d'imaginations. Il etait la fameuse matière grise du monde, du moins il y contriburait, c'etait écrit. Il n'avait plus qu'à implémenter son destin.
Félix avait commencé petit, mais la machine s'était emballée. Elle etait maintenant hors de contrôle. Félix ne pouvait plus s'arrêter, Félix ne pouvait plus l'arrêter, sa douleur était réelle. Il n'y survivrait pas. Quelques jours, c'est tout ce qu'il lui restait, il venait juste de se l'imaginer.
Félix était une boite à idée. Une de ces personnes, une parmi 100000, peut etre même plus encore, qui produisent les idées à la chaine comme ces usines de cigarettes, sans arret, indistinctement. Le problème de Félix c'est qu'il n'avait jamais le temps de les réaliser.
Il avait commencé petit. Une petite idée, brillante mais petite, pas de quoi y passer sa vie, pas de quoi en faire une carrière, ni prix nobel, ni carton d'invite pour TED. Il s'y était plongé à corps perdu, jour et nuit.
Implémenter une idée est une tâche de longue haleine, un long chemin dont il faut savoir garder le cap, un chemin lui même composé de myriades d'autres petites idées souvent oubliées, absorbées dans le résultat final.
Au bout de quelques jours, l'ennui avait commencé à s'installer chez Félix, la passion s'était peu à peu éteinte, le doute s'etait installé. Etait ce vraiment la bonne idée - the big one, celle qui allait enfin réveler au monde, et à lui même, qu'il était un pilier de l'humanité, une de ses fondations ?
Peu à peu, Félix s'était éloigné de son projet. D'autres idées avaient pris leur ascendant. Des idées qui étaient bien meilleures, selon Félix, bien meilleures. D'ailleurs il progressait, il le sentait. Sa connaissance des choses et du milieu s'était améliorée. Il était plus réaliste mais aussi plus prolifique. Le monde lui appartenait de nouveau, ILS ne le savaient pas encore, c'était tout.
Cette fois ci Félix ne mettrait plus de frein. Il ne se limiterait plus à une seule idée mais laisserait libre cours à son imagination.
La machine était reparti de plus belle. Les idées jaillissaient, par millier, des pierres précieuses à leur état brut, de futurs joyaux qui ne demandaient qu'à être taillés. Il consacrait de moins en moins de temps à leur réalisations, leur donnant à toutes la même priorité. Il butinait. Un peu de celle-la, un peu de celle-ci, elles avançaient toutes lentement mais toutes à la fois.
Le problème c'est que Félix était trop prolifique, une machine à idées, et les idées s'accumulaient, comme les projets, en rang d'onions, avec chaque jour un peu moins de temps à leur consacrer. La frustration de Félix finit par atteindre son comble. Toutes ses bonnes idées finissaient en projets avortés. Félix avait trouvé son véritable enemi, l'enemi de tous et l'enemi de toujours, le temps.
Mais Félix n'était jamais à court d'idée, car toute idée naît d'un problème, et celui-là était son ultime, il le savait. La solution ? Félix la portait depuis longtemps en lui. Il était le Leonardo Da Vinci des temps modernes. Il allait inventer une machine à sa mesure. Un système qui allait révolutionner l'humanité, pas moins: la machine à idée.
Le constat était simple, Félix divisait l'humanité en trois, les créateurs, les réalisateurs et les opérateurs. Félix le savait maintenant, il était un créateur et rien d'autre. D'ailleurs qui voudrait être autre chose ? Les créateurs, ces élites, étaient les demi dieux de nos jours. C'étaient eux qui créaient le sel de la terre, eux qui différenciaient le genre humain des autres espèces de ce monde. Le constat était simple, lui Félix était pourvu d'idées, sans doute comme nul autre sur cette terre. Le problème de Félix, c'étaient de les réaliser, il n'en avait ni le temps ni la passion. La machine à idées allait résoudre ce problème et ses frustrations.